Perdue, comme toujours. [libre]

Mitsuki n'avait pas quitté l'endroit d'où elle venait depuis bien longtemps. Elle errait depuis quelques jours dans les alentours, marchant de place en place, ne sachant jamais où elle était. Elle ne connaissait pas plus le nom de la ville où elle se trouver que celui des gens qui y habitait. Elle ne connaissait personne, elle ne connaissait rien. Sa mine sombre donnait un air d'ailleurs à cette fontaine majestueuse qui semblait attirer les couples. Elle ne supportait pas de voir des gens ainsi heureux, elle aurait préféré ne rien voir, ne voir personne. Elle s'assit sur le rebord de la fontaine prenant garde de ne pas mouiller ses habits de souillons, elle ne s'était pas changée depuis quelques temps maintenant. Ses yeux noirs fixèrent leur attention sur un oiseau, qui se dandinait au sol. Puisqu'elle n'avait rien d'autre à faire, elle attendit, obnubilée par l'animal.

S'étant enfermé pendant des jours dans son appartement pour exercer la magie et retrouver son habilité d'autrefois, Pierre s'était enfin décider à se doucher, se changer et à revoir la lumière du jour. Il avait marché çà et là sans faire vraiment attention à ce qui l'entourait. Il ne sortit de sa petite bulle qu'au moment où il entendit le plus bruit du monde pour lui, à savoir celui de l'eau qui coule. C'était bien évidemment l'eau de la fontaine. Ses yeux se fixèrent sur cette dernière pendant un très long moment. Le sorcier ne lâcha la fontaine du regard qu'une dizaine de minutes après. Son attention s'était dirigée vers quelque chose d'autre, ou, plus précisément, quelqu'un d'autre. Une jeune femme à l'air sombre qui contemplait un oiseau. Son attitude avait quelque chose qui plaisait beaucoup au jeune homme. Au début, il pensa qu'elle lui ressemblait beaucoup psychologiquement parlant car elle ne parlait pas , ne bougeait pas et été capable de se concentrer sur n'importe quoi et de rester là, à ne rien faire à par observer cette chose... Mais ensuite, il se dit que jamais il n'aurait osé sortir sans être impeccable de la tête au pied. Et puis quoi encore, depuis quand le physique était plus important que la personnalité ? Il remarqua que l'inconnue avait des bandages sur le bras. S'était-elle blessée ou l'avait-on blessé ? Comment savoir sans le lui demander ? Seulement si elle était belle et bien que le jeune homme, lui parler équivaudrait tout simplement à la déranger... et pour un rien en plus. Tant pis alors. Pierre s'assit sur un banc qui se situait un peu à l'égard des autres, il ferma les yeux et respira profondément l'air pur comme s'il n'avait rien vu de particulier.

Mitsuki ne lâchait pas l'oiseau des yeux. Mais après quelques minutes elle sentait qu'on s'intéressait à elle. Son don d'empathie mêlé à celui de télépathie lui indiquait tout, atour d'elle, elle savait les moindres pensées des gens, leurs intentions, leurs sentiments actuels. Son regard, attiré par le jeune homme blond, délaissa finalement l'animal. Il s'était assis non loin d'elle. Elle savait ce qu'il voulait savoir. L'homme ferma les yeux pour se laisser envahir d'un calme étrange. Il ne pensait plus. Mitsuki resta fixée sur le garçon, elle se leva d'une lenteur incroyable et s'assit auprès de lui. Elle ne parle pas, elle ne voulait pas troubler le silence qui semblait n'entourer que les deux individus. Elle posa ses mains sur ses genoux au dessus desquels s'arrêtait une robe blanche qui avait perdu de son éclat. La jeune fille regarda un instant encore l'homme blond avant d'examiner ses mains dont les ongles étaient noirs de saleté. La bise qui soufflait décoiffait Mitsuki, faisant voleter ses cheveux mis-long. Son allure frêle, ses vêtements sales, sa mine sombre, la confondait avec un sans-abris. Surement le garçon allait-il croire qu'elle venait demander de l'argent, mais là n'était pas son intention.

Alors que l'adolescent s'était laissé envahir par un vide total, il eut l'impression qu'on l'observait. Croyant que c'était n'importe qui à part la jeune femme, il ne prêta pas attention. Il pensait que la jeune femme était toujours entrain de regarder l'oiseau. S'il avait le don d'empathie ou de télépathie, il aurait su que c'était l'inconnue... Peu de temps après, il entendit et sentit quelqu'un s'assoir à côté de lui. Il ne broncha pas car il savait. Il était incapable de dire comment, mais il savait que c'était la jeune femme. Peut-être était-ce tout bêtement l'instinct ? Une fois que Pierre s'était parfaitement oxygéné, il ouvrit les yeux et les dirigea vers la personne qui était assise à côté de lui. C'était belle et bien l'étrange jeune femme. Il l'observa de la tête au pied pendant environ cinq secondes avant de tourner la tête et de regarder dans le vide. Il s'était aperçu que la jeune femme avait l'air... fragile. Peut-être avait-elle des problèmes avec ses proches. Le sorcier n'en savait rien. Par contre, il était persuadé que, psychologiquement, quelque chose n'allait pas chez l'inconnue. Et logiquement, ce souci se répercutait sur son attitude et son apparence. Oui, cette explication était plus ou moins valable... À ce moment, il suffisait que l'inconnue raconte son histoire, et Pierre pouvait reconstruire les morceaux de sa personnalité. Mais comme il était évident qu'elle n'allait pas se mettre à lui raconter sa vie, et que Pierre n'allait pas le lui demander, cela ne servait à rien de conjecturer ainsi sans jamais avoir la réponse. Le sorcier décida donc d'arrêter de réfléchir à ce sujet pour se concentrer sur une autre question tout aussi passionnante : pourquoi la jeune femme s'était-elle assise à côté de lui ? Plusieurs possibilités : soit elle avait appris d'une façon ou d'une autre que le jeune homme s'intéressait à elle, et elle s'était assise à côté de lui pour lui montrer qu'elle l'avait compris. Soit, elle en avait marre d'être assise par terre. Il fallait dire, il faisait assez froid... Pas non plus 0° mais quand même... Après tout, on était en plein mois de février... Il regarda à nouveau l'inconnue et lui demanda sur un ton qu'il s'efforça de rendre amicale :

"Vous n'avez pas froid ?"

» Perdue dans la vieille ville.
» Mayu Sakurako. Oui, je sais, c'est pourri, comme titre =.='
» Seule... [ Libre ]